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Voyages temporels suite

by Sbeu on jan.29, 2016, under Crobards

Suite du post d’hier avec quelques paradigmes de voyages temporels.

On peut en différencier trois grandes familles qui se déclinent chacune en branches : unicité de la ligne temporelle, univers parallèles et boucle temporelle.

La ligne temporelle unique. On voyage remonte vraiment le temps.
Les sous-familles recouvrent l’impact que le voyage a sur la ligne temporelle :

- Tous les voyages temporels ont déjà été pris en compte. Revenir dans le temps n’altère donc rien puisque les conséquences du voyage à venir s’appliquent déjà avant le départ (qui est inéluctable). C’est le moyen le plus facile d’éviter tout paradoxe. Il demande une préparation solide et ne laisse pas de marge à l’improvisation. Ca fonctionne bien au cinéma, ça n’a que peu d’intérêt en JdR car le joueur n’a aucun impact sur les événements et il est relégué en position de spectateur. C’est l’approche temporelle qui grave le plus la notion de destinée et d’absence de libre arbitre puisque pour que le passé et le présent soit cohérent, le futur est déjà pris en compte et d’une certaine manière, s’est déjà produit. De manière assez légère, c’est l’approche de Terminator I (mais pas du tout du deuxième opus).

- Les modifications opérées par un voyage temporel s’appliquent et modifient le futur dynamiquement. Cette approche implique une première concession qui en soi, constitue le premier et inévitable paradoxe temporel : le voyageur temporel conserve ses souvenirs de la ligne d’où il est originaire et constate les conséquences en revenant. C’est l’approche Retour vers le Futur. De par ses prémisses mêmes, cette approche accepte la présence de paradoxes et doit s’inscrire dans un contrat de narration où l’on privilégie les situations intéressantes que cela peut engendrer sans se préoccuper des boucles logiques. En JdR, ça fonctionne bien puisqu’on est d’accord d’entrée de jeu sur le fait que les conséquences plus que leur crédibilité importent.

Ca nous amène tout doucement aux univers parallèles. Il y a plusieurs approches qui déterminent quels sont les éléments déclencheurs pour une bifurcation entre deux univers et les modalités du passage d’un univers à l’autre mais les conséquences scénaristiques sont relativement faibles, mis à part d’un point de vue de responsabilité personnelle et morale du héros sur l’évolution de l’arbre temporel.

Détaillons donc :

- Soit chaque événement pouvant avoir plusieurs issues découle naturellement sur une bifurcation. Niveau combinatoire, c’est très vite assez pénible surtout si on introduit dans les paramètres de causalité toute modification d’événements dus au voyageur temporel lui-même. C’est le modèle déresponsabilisant. Tout a déjà eu lieu, le seul impact s’applique au voyageur puisqu’il choisit l’univers où les choses cadrent avec ses désirs/besoins. C’est aussi très rassurant car l’existence de l’univers en question n’est pas un problème en soi, la difficulté consiste à être capable de le trouver. Il n’y a pas de problème de cohérence non plus puique chaque univers est consistant ppris individuellement. Ce paradigme colle bien avec des objectifs de narration mettant en scène des personnages très puissants. C’est l’équivalent de plier l’univers à sa volonté, finalement, d’être capable de voyager dans l’univers qui est naturellement cpnforme à sa volonté.

- La deuxième approche est plus proche du concept de voyage dans le temps : un univers parallèle se crée à chaque voyage dans le temps pour prendre en compte les modifications engendrées. Les deux univers continuent à évoluer séparément. Ce modèle est très pratique car il n’y a pas de paradoxe. Il y est facile d’y tuer son père sans que cela ne pose de problème majeur ou d’y rencontrer son homologue puisque ce sont deux personnes réellement distinctes et que le voyage d’un univers A vers un univers B soustrait le personnage A de son univers. C’est très pratique et c’est tout à fait jouable. L’essentiel est de brider les moyens du voyageur temporel pour qu’il ne soit pas omnipotent. Une borne sup de longueur de saut par rapport à l’instant présent est un bon moyen de réduire le champ des possibles.

- Un détail intéressant avec les univers parallèles est que dans certains modèles, le voyageur ne change pas d’univers physiquement, il prend la place de son homologue dans l’univers cible. Je n’aime pas trop ce cas de figure parce qu’il réintroduit des paradoxes mais il introduit une dimension morale liée à ce qu’il arrive à son alter ego pendant ce temps.

Allez, on finit vite fait avec les boucles temporelles façon Un jour sans fin . Pas de paradoxes non plus dans ce modèle puisqu’au moment de la sortie, il n’y a qu’une ligne temporelle. La seule chose qui change, c’est le niveau d’information accessible au protagoniste relatif aux itérations passées. Ca ne pose pas de problème majeur à raconter ou jouer.

En conclusion, j’ai envie de dire que les trois paradigmes propices à du JdR sont la ligne unique avec impact et puissance limitée du voyage si on joue à la cool, les univers parallèles suivant le niveau de puissance conféré au joueur et la brave boucle temporelle, qui est sûrement la plus simple à utiliser.
Plein d’indices, pas assez de temps pour tout récupérer et des indices qui servent à débloquer des situations forçant le joueur à faire une passe de collecte et une passe de déclenchement de l’événement.

Unrelated…

Gunnar

Gunnar

Skaftafell

Skaftafell

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Voyages temporels & Monster design

by Sbeu on jan.27, 2016, under Crobards

Comme suggéré par Athreeren, un petit post sur les voyages temporels en scénario en général et en JdR en particulier. Le sujet étant particulièrement vaste, je pense que ça prendra plusieurs articulets, ce qui me permettra de meubler autour des gribouilles.

Dans la suite, je vais citer quelques exemples de voyages temporels dans le domaine public cinématographique : Terminator (premier du nom), Retour vers le Futur (tous) et Un jour sans fin. Pas de vrai gros spoil mais si vous ne les avez pas vus, vous savez ce qu’il vous reste à faire…

Les voyages temporels sont un sujet épineux en scénario sur lequel il est très facile de se vautrer dans les grandes largeurs, mais qu’est-ce-que c’est cool… Pour commencer, revoyons les principaux problèmes qui peuvent (mais pas nécessairement) découler sur un mauvais scénario.

- Il y a des paradoxes logiques : ce n’est pas nécessairement gênant. Ça dépend très fortement de ce que le film promet. On verra justement un peu plus loin les contrats de narration des scénarios impliquant des voyages temporels. En l’état, c’est le moins grave des problèmes.

- La complexité explose : celui là est rédhibitoire. Si la complexité rend le scénario incompréhensible et même s’il n’y a plus de faille logique une fois la pelote déroulée, c’est un point problèmatique. C’est vrai au cinéma, ça l’est encore plus en JdR où une interaction est demandée de la part du joueur et du Meuj’ et où des problèmes de compréhension cassent le rythme.

- Les voyages temporels tirent la couverture à eux : Pour les deux raisons précédemment citées, le respect de la causalité demande une gymnastique cérébrale importante qui fait qu’on se focalise trop sur eux au détriment des personnages. Or ce qui rend un scénario intéressant, ça reste les personnages. Du coup, un gimmick scénaristique prend plus de place que ce qui devrait lui être accordé…

Du coup, on peut évoquer les principaux contrats de narration qui fixent ce qu’on est en droit d’attendre du scénario. Comme d’habitude, c’est ce sur quoi les attentes du spectateur/joueur et les intentions du scénariste doivent concorder sans quoi, c’est l’échec assuré :

- Serious business : ici, on se fout pas de la gueule des gens, c’est sérieux et on a bien ficelé notre affaire : il n’y aura pas de paradoxe dans le scénar. La conséquence principale est que le sujet du scénario est le voyage temporel et que tout tourne autour. La fibre majoritairement sollicitée est la logique et le scénario est un puzzle dont toutes les pièces doivent s’assembler à la fin.

- Un artifice au service de la mise en place du scénario : au contraire du précédent : le voyage temporel sert juste à introduire des situations et des personnages servant l’histoire et qui seraient impossibles sinon mais avec des répercussions mineures sur la suite. C’est le cas à mon avis de la majorité des épisodes de Dr Who où un épisode commence sur un voyage suivi d’une indisponibilité du TARDIS pour une raison quelconque (qui souvent est la curiosité du Docteur). Le voyage temporel sert alors à poser les éléments initiaux de l’histoire sans servir par la suite à son dénouement. Quand on y réfléchit bien, il y a presque toujours un moyen de rendre une situation épineuse plus facile à gérer en remontant un peu dans le temps.

- Un outil récurrent du scénario mais sert à amener des situations intéressantes sans que l’on ne se préoccupe particulièrement de la crédibilité de l’ensemble. On est d’accord d’entrée de jeu sur le fait que c’est le côté cool de la chose et les situations que ça engendre qui sont intéressantes (pour leur aspect). Ici, on cherchera à résoudre les situations individuellement par des voyages dans le temps en cherchant à créer des quiproquos et du comique de situation ou de l’ironie dramatique puisque le voyageur temporel dispose d’informations inaccessibles aux autres personnages. La cohérence de l’ensemble importe peu.

La prochaine fois, on évoquera les principaux paradigmes de voyages temporels et les règles qui les régissent.

***

Et sinon, un petit exo de design de monstres (que je recommande chaudement à LCF) : prendre une image de référence pour l’anatomie et la déformer pour plaquer un monstre dessus avec les bizarreries que ça engendre. Ici, l’exo est le même pour les deux images, la première fois, faire un monstre plus vieux/laid que le modèle original (qui étaient plutôt bien gaulés quel que soit leur genre) et la deuxième fois, quelque chose en forçant plus sur les caractéristiques flatteuses des modèles. Ah, et puis pas dépasser la demi heure aussi, pour se focaliser sur l’essentiel.

Troll

Troll

Minotaur

Minotaur

Harpy

Harpy

Werefox

Werefox

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Amnésie

by Sbeu on jan.07, 2016, under Crobards

Pas trop de temps pour faire l’article d’une traite donc je vais le faire incrémentiellement, comme les compte rendus longs.
Athreeren m’ayant relancé au bas de mon post précédent sur l’amnésie en tant qu’outil narratif et les conditions dans lesquelles c’est un procédé acceptable ou non, je m’en vais vous livrer quelques détails totalement subjectifs sur ce grave problème.

Pour commencer, documentons nous à la source : Tv Tropes (et là aussi).

C’est bon, vous avez perdu trois heures à suivre des liens ? Ok, revenons à nos moutons.
Comme dit dans les liens, l’amnésie est un outil narratif qui a été utilisée fort souvent, est souvent évitable et par conséquent, ressemble facilement à un procédé de facilité de la part de l’auteur.
Tout le monde a entendu au moins une fois que l’amnésie, dans la vraie vie, ça marche pas comme chez Jason Bourne et on est donc globalement sensibilisé au fait qu’il s’agit d’une astuce scénaristique.
Par conséquent, c’est quelque chose qui nuit à l’immersion et à la suspension volontaire d’incrédulité car ça nous rappelle que derrière toute amnésie, il y a un scénariste (fainéant) qui se cache.

Avant d’approfondir la question, on peut se demander pourquoi c’est un procédé si utilisé si l’astuce est éventée. Ben tiens, c’est parce que c’est vachement pratique…
L’amnésie permet d’atteindre facilement deux objectifs.
- Un but d’exposition : Le protagoniste auquel on s’identifie est aussi peu au courant des détails de l’univers dans lequel il vit que le spectateur et ça semble légitime qu’il pose des questions à son entourage sur des choses qu’il devrait savoir s’il avait un tant soit peu de mémoire. Ça évite des scènes d’exposition super bizarre où quelqu’un explique des choses que tous les personnages savent, rendant totalement déplacée l’explication… Mais ça reste aussi une grosse solution de facilité. Pour atteindre cet objectif, il y a toujours des moyens souvent plus percutants (faut se rappeler le bon vieux principe du « Show, don’t tell ») qui rendent superflues la majorité des scènes d’exposition. Bref, l’amnésie, c’est tricher et en plus c’est finalement assez maladroit.
- Un but d’introspection : La raison un peu plus légitime d’utiliser l’amnésie comme processus narratif est que le personnage n’est pas seulement ignorant de ce qui l’entoure, il est aussi ignorant de sa propre personnalité et de ses actions passées, l’amenant à mener l’enquête sur lui même (je sais… ça marche pas comme ça en vrai, blablabla). Ça peut être très bien exploité (Memento)… mais c’est rare et c’est souvent assez facile de briser la suspension d’incrédulité quand même.

Par ailleurs, même si c’est intéressant pour un personnage de découvrir que ses actions passées ne correspondent pas avec ça personnalité actuelle, cela n’est pas forcément nécessaire et on peut aussi faire découvrir au spectateur qu’un personnage repenti a honte de son passé. A mon avis, le spectaculaire du choc et le suspense de l’enquête ne valent pas souvent le coup par rapport au développement du personnage possible s’il est conscient de son passé. On gagne un tout petit peu en capacité d’identification au personnage (l’empathie n’est pas dirigée exclusivement au profit des amnésiques, sinon, autant dire que ça ne servirait pas beaucoup) mais on perd systématiquement beaucoup en crédibilité et on risque de se fermer pas mal de portes.

A noter qu’un moyen de contourner ce prémisse narratif est de faire mener l’enquête par le protagoniste sur son propre futur (Minority Report). Auquel cas, on a un personnage paumé, enquêtant sur lui même tout en ayant tous ses souvenirs. Le beurre et l’argent du beurre.

Bien bien… Du coup, partant de ce constat, comment l’amnésie serait-elle plus légitime dans du jeu de rôle narrativiste sans préparation ?
Le point important, c’est le terme « sans préparation ». Le système de ces jeux est intégralement conçu pour fournir une structure permettant de cadrer et fluidifier la construction d’une histoire. Ici, le spectateur et le scénariste sont la même personne et le système entier est fait pour qu’une dizaine de minutes permettent de rentrer dans le vif. Par nature, le conteur/scénariste/spectateur n’a aucune connaissance de ce qui va se passer, juste une petite idée de la direction dans laquelle l’histoire va aller. Il a le pitch de l’histoire mais pas le synopsis. La possibilité d’identification est d’autant plus renforcée qu’il est acteur autant que témoin des scènes qui se construisent et dans les faits, il est exactement dans la situation de l’amnésique puisqu’il découvre le cadre et son propre passé durant la partie. Evidemment, il faut jouer le jeu car si le joueur réfléchit à l’avance et commence à se créer un background en amont, on perd l’effet d’immersion pour retomber dans les limites énoncées précédemment.
Du coup, je pense que l’amnésie devient un procédé narratif fonctionnel pour les joueurs.

Au contraire, dans un film/roman ou autre œuvre dramatique, le spectateur est consommateur de contenu et est conscient qu’il s’agit d’une fiction, travaillée par un scénariste. Il sait que l’histoire a été préparée et l’emploi de solutions de facilité brise sa propre immersion dans l’histoire. Et là, je sais ce que vous allez me dire : du coup, ton compte rendu est tout pourri, parce que moi, je suis lecteur et pas acteur de ta partie et que tes histoires d’amnésiques… j’arrive pas à rentrer dedans. Et c’est tout à fait légitime. Un compte rendu de partie sera toujours moins intéressant pour les lecteurs que pour les acteurs et je pense que si le JdR narrativiste est satisfaisant et donne l’impression de construire de bonnes histoires, c’est surtout à ses joueurs pour des raisons d’implication et de timing de construction. Le lecteur du compte rendu n’a pas ce lien personnel à l’histoire et sera moins impliqué émotionnellement dedans.

Il faut aussi noter que ce procédé reste une grosse ficelle même dans le cadre du JdR. Des systèmes narrativistes qui fonctionnent, il y en a plein et même si un certain nombres partent du prémisse de l’amnésie, cela reste une minorité.

Pour conclure, j’ai envie de dire que l’astuce de l’amnésie fonctionne mieux en JdR qu’ailleurs pour permettre une implication émotionnelle des participants, ce qui est un des buts du jeu. Les joueurs passent donc facilement un bon moment ou au moins une partie intéressante. Ce n’est pas pour ça que l’histoire qui en résulte est nécessairement bonne puisque, vue de l’extérieur, elle présente exactement les mêmes défauts qu’une histoire d’amnésiques classique.

Cette discussion se poursuit dans les commentaires que je vous invite vivement à suivre pour plus de détails sur le sujet.

Sans aucun lien histoire de ne pas remplir mon tag « Text Only »
C’est marrant parce qu’à l’époque où je jouais à Donj’ je ne jurais que par l’arc long composite et l’épée à deux mains (bigger is better). Si j’avais à recréer un perso, je pense que j’opterais maintenant pour une petite arbalette à main (quand il y a un tout petit peu trop de distance), une lance ou un Naginata (pour garder l’ennemi loin), une dague qui sert aussi de couteau pour la cuisine en dernier recours et pour les boyaux étroits (s’applique à la topologie du donjon et à l’anatomie de l’adversaire) et de la magie.
Maintenant, je penserais aussi à emporter cordes, sac de couchage et une quantité raisonnable de bouffe et de torches. Comme quoi, avec l’âge, je crois de je ne claquerais pas tout mon pognon chez l’armurier et un peu plus au magasin général…

Naginata

Naginata

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Effusions

by Sbeu on juil.15, 2014, under Crobards

Rebondissant sur un événement suffisamment rare et apprécié pour marquer l’histoire, j’y vais de ma petite larmichette personnelle.

Adoncques, Enizya nous y faisait part du plaisir qu’elle trouvait à lire les différentes productions des membres de la phalange (article qui semble au demeurant avoir ravivé la flamme vacillante de nos motivations au moins sur le court terme). Je profite donc du fait que l’esprit soit aux effusions pour vous faire part en plus de mon plaisir à vous lire de mon plaisir d’être lu.

Bien qu’étant encore toujours loin des objectifs tant de niveau technique que d’intérêt des sujets de mes productions que je m’étais fixés, je ne peux que constater que j’ai compris quelques trucs au fil de mes expérimentations et qu’au moins j’ai apprécié effectuer ces recherches. Le fait d’afficher mes gribouilles sur le présent blog m’a permis de rester un minimum motivé et de perdurer là où la flemme aurait facilement pu (encore plus) l’emporter. Et je puis donc affirmer sans trop m’avancer que ce blog a contribué dans une bonne mesure aux progrès que j’ai pu faire ces dernières années.
Mais bon, un blog sans public, ce n’est guère plus qu’un espace de stockage ouvert aux quatre vents et le vrai mérite revient donc aux lecteurs commentateurs qui sont passés régulièrement ou passent toujours en ces lieux et sans qui le sbeulog n’aurait pas dépassé la dizaine d’entrées.

Merci à tous, plein de bisous, et stay tuned, je m’y remets !

Allez, pour s’entraîner, un portrait viteuf d’un mec un peu connu.

What else

What else

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Interlude éducatif, où l’on gagne beaucoup d’honneur.

by Sbeu on mar.27, 2014, under Crobards

Suite à mon périple de l’été dernier et sur les conseils avisés d’epsyloN, je suis en train de lire la saga (j’espère que Typhon passe encore par ici de temps en temps, ça lui fera plaisir de voir ce mot employé à bon escient) de Njal le brûlé, figure éminente du moyen-âge islandais.
C’est une lecture que je ne peux que recommander. Le style lapidaire du chroniqueur qui va droit à l’essentiel (et les probables difficultés de traduction) contribuent à poser une ambiance tout à fait immersive où les seigneurs locaux se tapent dessus avec entrain et gagnent beaucoup d’honneur. C’est sur se dernier point que l’on s’attardera aujourd’hui.

Comme on pouvait s’y attendre, l’honneur est le point crucial de la vie de l’islandais un minimum noble. Ce qui est bien plus surprenant, c’est que l’honneur y est décrit comme un produit tout à fait quantifiable. Je vous propose donc dans la suite de cet article un petit tutorial pour gagner beaucoup d’honneur.

Mais déjà, l’honneur, comment ça se gagne ?

On passera rapidement sur les moyens classiques d’acquérir de l’honneur

- Pourfendre moult ennemis dans des batailles en notre défaveur
- Raider du butin à l’étranger
- Avoir un talent spécifique : voir l’avenir, ne jamais mentir, nager comme un phoque (sic.)
- Naître dans une famille honorable
- S’allier avec une famille honorable par le mariage ou l’adoption
- Avoir un rang social établi

Tout ça c’est bien joli mais ça a l’air dur de gagner de l’honneur en fait. Pas de panique, il existe en effet bien d’autres moyens d’en accumuler. La clé, c’est avec qui tu agis socialement :

- Interagir honorablement avec une famille avec de l’honneur. Ici, ça fonctionne comme les classements au tennis sauf que tout le monde gagne. Interagir socialement avec une famille plus honorable permet de gagner beaucoup d’honneur tandis que la famille la plus honorable en gagne un peu. Note : en Islande, au XIII ème, interagir socialement, c’est inviter à des fêtes et offrir des cadeaux. Ca reste donc assez coûteux et il ne faut pas faire de faute de gout sur le cadeau.
- Conclure une transaction ou arbitrer une querelle entre gens honorables.
- Gagner un procès : l’Islandais moyenâgeux est assez procédurier et les procès sont une source intarissable d’honneur. Il n’y a même pas besoin de le gagner, une belle procédure sans faille exploitable, c’est déjà un beau paquet d’honneur gagné. De ce que j’ai compris, les procès sont lancés contre des gens honorable qui reconnaissent de toutes manières leurs torts donc le seul moyen de gagner un procès quand on défend, c’est le vice de procédure.

Document histoirque représentant Njal le brûlé (aussi surnommé Phoenix Njal car il renaît de ses cendres hahaha…) en pleine plaidoierie.

Phoenix Njal

Phoenix Njal

Perdre de l’honneur. Le risque est grand dès que l’on fait soi même quelque chose qui enfreint les règles ci-dessus, on perd de l’honneur dans des proportions similaires.
Il existe néanmoins une faille qui réside dans le fait qu’il est honorable de respecter la volonté d’autrui, même s’il est rattaché hiérarchiquement au clan que l’on dirige. Un acte déshonorable tâche la responsabilité de celui qui le commet et pas de ceux qui l’ont laissé commettre. En gros, la non assistance à personne en danger, c’est un truc pour les faibles.
De même, révéler un secret ou une information compromettante fait perdre de l’honneur même si sa divulgation permettrait de sauver quelqu’un.

Du coup, la boucle infinie d’honneur :

Avant de débuter, il est à noter qu’elle semble fonctionner en Islande au XIIIème siècle mais que sortie de ce contexte, je déconseille assez fortement son application. La fameuse faille présentée ci-dessus n’est en effet plus d’actualité dans la majorité des contextes modernes.

- Naissez dans une famille d’hommes libres.
- Déclarez votre intention de partir à l’étranger. Votre seigneur local financera votre voyage pour peu que vous soyez neutre en honneur en vous prêtant un bateau et des compagnons. Si vous êtes en négatif, nagez comme un phoque et lèchez quelques bottes. Un petit cadeau à des gens blindés d’honneur devrait équilibrer la balance.
- Raidez la côte d’un pays étranger. Offrez la moitié du butin au seigneur local ennemi de la province raidée. Gardez les esclaves, les navires capturés et 200 onces d’argent c’est très important. Passez l’hiver au chaud chez votre protecteur.
- Au printemps, émettez le souhait de rentrer en Islande. Votre protecteur vous fournira la farine pour le trajet du retour même si la disette menace (question d’honneur). Il vous offrira une breloque exotique qui permettra d’attester que vous êtes dans ses bonnes grâces.
- De retour à la maison, offrez les bateaux pris à votre mécène, ils ne vous serviront plus. Ça et la breloque permettent d’officialiser l’honneur gagné à l’étranger.
- Il est temps de vous munir d’un accessoire essentiel : une épouse. Fort de votre nouvel honneur, la tâche devrait être aisée. Faites financer la part de votre dot par votre protecteur qui vous en doit une parce que vous venez de lui ramener des bateaux et du butin. Pour plus de simplicité, épousez sa fille si possible.
- Installez vous dans le domaine reçu en dot.
- Rapprochez vous de la famille la plus honorable de la région (plus honorable que votre famille).
- Arrangez vous pour que votre épouse se fâche avec l’épouse du chef de votre famille cible. A ce que j’ai compris, ça a l’air très facile. Cette phase ne nécessite pas d’intervention active de votre part.
- Tôt ou tard, votre épouse enverra un esclave (je vous avais bien dit qu’il fallait en garder) narguer la famille d’en face en chassant chez eux ou en coupant leur bois. Vous le savez mais l’empêcher contraindrait sa liberté et nuirait à votre honneur (la fameuse faille)
- L’esclave en question finit par mourir de mort violente.
- Nommez vos témoins, lancez un beau procès dans les formes au prochain Althing. La procédure bien menée vous fait gagner beaucoup d’honneur.
- Acceptez un arbitrage à l’amiable, recevez la compensation pour l’esclave tué. L’arbitrage fait gagner de l’honneur à tout le monde et neutralise tout précédent fâcheux. Vous êtes donc toujours en excellents termes avec le chef voisin. C’est pas votre faute si vos épouses ne peuvent pas se blairer.
- Gardez précieusement la compensation, si possible dans la bourse même qui la contenait.
- Votre épouse n’accepte pas la compensation. Elle fera donc tuer un esclave d’en face sous peu. Cela n’engage pas votre honneur.
- Demandez un arbitrage lors du procès qui suivra, rendez la compensation. Beaucoup d’honneur est gagné aujourd’hui.
- Itérez. Au bout d’un moment, ça escaladera et on ne parlera plus d’esclave mais d’hommes libres, puis de vos fils (à ce moment, vous devriez avoir acquis cet accessoire). Au fait, vous avez bien gardé les 200 onces d’argent ? Parce qu’il vaut mieux les avoir sous le coude, c’est la valeur de compensation d’un homme libre.
- Arrêtez l’affaire quand la dernière possibilité est d’engager un duel avec le chef d’en face. A ce moment, il est bien plus vieux que vous et il refusera l’affrontement. Dans ce cas, il perdra de l’honneur et vous deviendrez l’homme le plus honorable de la région.

Vous êtes désormais respecté et tous les hommes moins honorables que vous vous jalousent. Vous vous êtes probablement fâché avec votre femme d’ailleurs, n’ayez crainte, quand les jeunes loups en quête d’honneur appliqueront la recette miracle sur vous, elle sera là pour précipiter votre trépas en souvenir de la fois ou vous avez interrompu sa soif insatiable de vengeance parce que ça suffit maintenant.

Félicitations, vous êtes mort honorablement.

Allez, à bientôt pour la fin de Polar Base.

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Métajeu & Ouipe tradi

by Sbeu on mai.29, 2013, under Crobards

On arrive donc au métajeu (et après, promis, j’arrête. Ça a pas l’air de passionner les foules et je sens bien les tl;dr).

Le rôliste propre sur soi qu’on interroge à propos du métajeu à tendance à répondre que c’est le mal absolu et qu’il faudrait pendre tous ceux qui en font avec les tripes de ceux qui utilisent des figurines. J’ai envie de dire que c’est un mal nécessaire voir que c’est indissociable du JdR et que ça occupe beaucoup plus de place que ce qu’on croit.

Le métajeu donc, c’est prendre des décisions en jeu ou autour du jeu en exploitant des informations externes au cadre strict du jeu. Dans un jeu de société, c’est assez clair, respecter strictement les règles du jeu, c’est ok, utiliser une connaissance des habitudes de son adversaire, des tendances et stratégies à la mode pour les contrer, c’est méta.

En JdR, c’est plus délicat et encore une fois, c’est très différent entre ludisme et narrativisme.

Niveau ludisme, toute information à laquelle le personnage n’a pas accès prise en compte lors d’une décision est du métajeu. La limite avec les règles est beaucoup plus floue qu’avec un jeu de société classique puisque le personnage n’a pas conscience qu’il est dans un jeu régi par des règles simplificatrices, ne devrait pas les prendre en compte non plus et raisonner en termes de principes physiques à la place. Anticiper un combat en s’appuyant sur sa connaissance des stats du monstre, des probabilités et prévoir sa tactique en conséquence, c’est déjà limite mais ça fait partie du jeu et ça participe à la résolution des défis posés.
A fortiori, l’optimisation d’un perso, le powergaming ou plus généralement les choix d’évolutions lors d’une prise de niveau, même si on les redécore avec un vernis de rôleplay visent à se plier à des contraintes de système.
Cela touche encore plus les conventions narratives qui permettent d’avancer et d’incarner un personnage : difficile d’interprêter un pur rôle de composition surtout quand il faut mettre du sien pour maintenir la cohérence. Il m’est souvent arrivé de vouloir dire à un commanditaire en début de scénar que franchement, sa mission ne m’intéressait pas et que je n’avais rien à gagner. De même, les antipathies ou incompatibilités entre moralité des personnages donnent souvent lieu à des groupes bancals qui ne se seraient jamais montés et qui n’ont aucune autre raison de tenir que la cohésion du groupe vis à vis du scénar et le respect du meuj’.

Le meuj’ n’est pas en reste non plus comme détaillé dans ce Trope . C’est tricher, c’est du métajeu mais ça rend la partie intéressante. Sa capacité même à infléchir un scénario et à modifier à la volée la difficulté ou les objectifs pour cadrer aux attentes de la table, c’est déjà très limite mais c’est le coeur du rôle.
Là où je veux en venir c’est que si l’on ne s’adapte pas aux joueurs mais seulement aux personnages aussi bien en tant que joueur qu’en tant que maître, on passe à côté de l’objectif principal du jeu qui est d’être plaisant pour tous…

Niveau narrativisme, c’est un peu différent parce qu’ayant beaucoup plus de pouvoir sur l’histoire et étant moins lié au personnage, le joueur a accès à beaucoup plus de possibilités et d’informations. Une démarche classique consiste à trouver comment mettre son personnage dans les ennuis de la manière la plus intéressante possible là où un ludiste chercherait à éviter des tracas supplémentaires.
Du coup, un narrativiste qui revient au ludisme risque de faire beaucoup plus de métajeu qu’avant à cause d’habitudes parfaitement valides dans le storygame. Comme dit précédemment, les contraintes de métajeu du narrativiste sont très proches de celles du maître en ludisme.

Ca conclut mes réflexions du moment. Peut-être que j’enfonce des portes ouvertes ou retraite un sujet maintes fois couvert sur l’interwebz mais en tous cas, ça m’aura au moins permis à prendre conscience d’automatismes et à améliorer un peu ma pratique de ce loisir.

Sinon, un crobard en tradi que je m’apprête à mettre en couleurs à l’acrylique. Si vous êtes choqués par des détails de compo, de perspective, d’anat, c’est le moment de se manifester avant que j’y passe trop de temps sans me rendre compte de grosses failles!

Crobard

Crobard à peindre

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Considérations sur les règles & vieilleries

by Sbeu on mai.28, 2013, under Crobards

Ok, donc après avoir abordé au post précédent le contrat ludique, on sait maintenant globalement ce qu’on attend d’une partie et dans quel genre de jeu le chercher.

Reste donc à détailler un peu les moyens mis à disposition, en l’occurrence, le système de règles.

Un système de règles vise à servir son contrat ludique de la manière la plus compacte possible de manière à éviter d’entraver le jeu en lui même. Elle sert de support et de cadre à la narration. Par conséquent, c’est un bloc de contraintes qui fixent des limites aux joueurs de manière à ce que la partie se déroule de manière prévisible et ordonnée. Une règle, en décrivant ce que le joueur peut faire, impose surtout ce qu’il ne peut PAS faire.

Les différences majeures entre les contrats ludiques énoncés plus hauts conditionnent énormément les règles. Ainsi, des règles ludistes permettront-elles de définir et cadrer les menaces à surmonter (enquête, baston…). Comme il est question de défis, la difficulté et la progression doivent être mesurables et un défi global est souvent dissociables en une multitude d’éléments atomiques qui sont autant d’étapes intermédiaires. De cette manière on résoud progressivement un défi qui d’étale sur tout un scénario. Cela qui implique souvent une mise en scène plus tactique proche du personnage (les combats classiques par rounds d’initiative) permettant de développer un affrontement de manière dynamique et un affrontement qui a bien commencé peut mal tourner et demander de l’adaptation.
Dans l’article précédent, j’ai volontairement occulté la mouvance simulationniste qui forme la troisième tête du triumvirat GNS (Gamist, Narrativist, Simulationist) que j’ai tendance à considérer comme un sous-ensemble du Ludisme dont le système est adapté pour fournir des contraintes plus précises autour du thème développé à restituer.
Dans tous les cas, le rythme de la partie est dicté par le scénario et les critères de validation sont aisés à mettre en place : enquête résolue, indices découverts, boss tabassé. La contrepartie est que les règles peuvent devenir étouffantes, un combat peut s’éterniser et devenir trop calculatoire, nuisant au flux de l’histoire.

Au contraire, un set de règles d’un jeu narrativiste vise à contraindre le flux de la narration et la répartition des rôles autour de la table. Comme vu précédemment, l’objectif étant ici souvent non plus de résoudre des problèmes mais de les créer et les voir se résoudre mécaniquement. Les systèmes de résolution sont souvent très expurgés de la notion de difficulté qui n’est plus un critère pertinent pour remplir les attentes des joueurs. En effet, la distanciation ayant eu lieu, savoir si c’est réussi ou raté devient moins crucial que de savoir comment ça oriente la suite et quelle est la cohérence globale des éléments mis en jeu ou en cas d’absence de cohérence, comment la retrouver. Par conséquent, les règles de résolution de situation incertaines sont très souvent légères et équilibrées, sorte de réemballage du bon vieux pile ou face en lui ajoutant une couleur qui cadre avec l’ambiance et l’enchaînement désiré des scènes.
La conséquence de cette disparition de la difficulté est que si les deux donnent lieu à un test, combattre un dragon a environ autant de chances d’aboutir qu’écraser un cafard.
Ici, comme il n’y a pas de scénario préétabli et que la difficulté n’est pas un critère, les règles de gestion de flux de narration doivent donc fournir des critères d’arrêt à la partie. Ces derniers sont basés sur des mécaniques simples qui cadrent avec le développement d’un arc narratif (évolution de l’histoire des personnages via le système PDA de Remember Tomorrow, les fronts d’Apocalypse World, l’utilisation des mots de la lettre dans Do). En général, c’est calibré pour plutôt bien marcher et donner lieu à une ligne directrice d’histoire qui suit un chemin « prévisible » et en accord avec la thèmatique principale du jeu (développement de personnages, construction de civilisation, opposition entre joueurs…).
De prime abord le principe des critères d’arrêt est assez déroutant. Une fois qu’on a pris l’habitude d’ignorer cet aspect purement mécanique et de suivre la trame qu’ils imposent en se concentrant sur la narration, ça passe très bien. Si le jeu est bien équilibré, on retombe toujours sur ses pattes de manière satisfaisante.

Si on veut faire une petite métaphore, le ludiste est le cobaye d’une expérience conçue par le Meuj.
Le narrativiste se réunit avec des collègues, ils gonflent l’entropie d’un système en jouant chacun sur un paramètre qui les intéresse et ils le regardent revenir à sa nouvelle position d’équilibre.

Ça me permet de rebondir sur ce que je disais précédemment quand au fait qu’un groupe de narrativistes, c’est une bande de Meujeus qui conçoivent un scénar ensemble.
C’est peut être pour ça que je m’y retrouve, finalement. Sur les systèmes ludistes, j’ai souvent pris beaucoup plus de plaisir à Meujeuter qu’à jouer. Le plus par rapport à un meujeutage classique est que l’histoire te résiste et ne va pas naturellement là où tu veux, cela demande des efforts pour l’y amener.

Et donc prochainement, on causera métajeu.

Pour pas poster à vide, je ressort une série de vieilleries d’un coin de carnet. Une petite série d’études d’après refs photo, souvent de cosplayeurs(euses). J’en ai peut-être déjà sorti quelques unes auquel cas, c’est du réchauffé mais j’ai un peu la flemme de vérifier.
C’est plus grand si cliquage, comme d’hab’.

Vieilleries

Vieilleries

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Un peu de théorie & le Pirate Zombie

by Sbeu on mai.26, 2013, under Crobards

Dis Sbeu, tu nous parles de narrativisme mais on sait toujours pas ce que c’est…

Comme promis donc, deux trois petites considérations théoriques suite à mes récentes parties d’indie.

Beaucoup de ces sujets ont été couverts par des personnes ayant réfléchi avec plus d’attention que moi au problème (et dont certains sont en liens d’ailleurs)

Quelques définitions pour commencer.
Le terme narrativiste est un vilain mot valise duquel on a tendance à se réclamer ou se désolidariser plutôt par opposition à un autre groupe honni. Par conséquence, d’aucuns se découvriront une fibre narrativiste pour marquer leur distinction avec le donjonneux qui s’adonne à du PMT au lieu de l’aisser l’ordinateur se taper la mécanique laborieuse via un Hack & Slash vidéoludique. Tandis que d’autres s’éloigneront comme la peste de ces barbares qui dénaturent la pratique ancestrale rôliste.

Par la suite, j’emploierai le terme narrativisme comme équivalent de la notion anglo-saxonne de « story game ». Le sujet a été traité et flamé à maintes reprises sur les Internets j’aime bien les répétitions et quelques petits rappels ne font pas de mal.

On distingue donc des grandes familles de contrats ludiques auxquels souscrivent plus ou moins implicitement les joueurs et qui définissent les critères de validation d’une partie satisfaisante ainsi que les compétences mobilisées par les joueurs :

- le contrat ludiste : l’objectif du joueur est de surmonter virtuellement des difficultés par l’intermédiaire de son avatar. Cela consiste donc à trouver la solution à un défi préexistant (conçu par le meuj’). Le partage des informations est asymétrique, la résolution du défi nécessitant généralement que les joueurs accomplissent des étapes intermédiaires de préparation (exploration, enquète, entraînement) afin d’atteindre leurs objectif. C’est la mouvance classique du rôlisme. Le joueur dispose d’informations parcellaires et doit en découvrir plus de sorte à résoudre le problème qui lui est posé. Un Meuj est donc nécessaire et occupe une position en cela qu’il dispose de toutes les pièces et qu’il incarne l’adversité qui s’oppose aux personnages joueurs. Il a le dernier mot et dispose d’un contrôle total sur les conséquences des actes des personnages ainsi que sur le scénario prévu. Son rôle n’est néanmoins pas une opposition franche puisqu’il vise à atteindre l’équilibre qui permette aux joueurs d’atteindre la satisfaction d’avoir progressé dans la résolution du défi initial, ce dernier ayant posé un challenge.
On sollicite ici des compétences de type cognitives et logiques qui visent à trouver la solution à un problème existant et non connu à l’avance.

- le contrat narrativiste : L’objectif des joueurs est de raconter une histoire en coopération. Chacun apporte des éléments personnels. A terme, l’histoire contée doit être satisfaisante pour les participants. Ici, les rôles sont mieux équirépartis. Personne ne connaît à l’avance le déroulement prévu de la partie, et les joueurs découvrent ensemble ce que les autres ont à apporter. Il est relativement vain d’espérer anticiper les événements à venir étant donné que les joueurs ont tous un pouvoir plus étendu sur l’environnement et les péripéties. Le tour pris par les événements couverts est très mobile notamment parce que chacun est amené à introduire des éléments, factions personnages nouveaux à n’importe quel moment sans que cela ne soit anticipable par les autres. Ce lissage des responsabilités du cadre de jeu explique pourquoi ce contrat se prête mieux à la maîtrise tournante et répartie en cours de partie.
Au contraire, ici, on sollicite donc des compétences créatives puisqu’au lieu de résoudre un problème, on cherche à le créer et à observer sa résolution mécanique.

Par conséquent, l’aspect gratifiant et les éléments mis en valeurs sont d’ordre différents.
- Dans un cadre ludiste, la seule prise du joueur sur l’environnement passe par son personnage. Sa capacité d’influence est donc plutôt proactive. La distanciation avec le personnage contrôlé est faible et l’empathie à son égard est simple à mettre en place. La contre partie est que l’environnement doit réagir de manière satisfaisante et le plaisir global à l’issue de la séance dépend énormément de la compétence du Meuj’ et de l’adéquation de la manière dont il incarne l’environnement avec les attentes des joueurs. La moindre désynchronisation rend une partie facilement laborieuse dans la mesure où l’enjeu des actions entreprises par les personnages décroît à mesure que leur impact sur l’environnement semble inadéquat. On favorise donc l’immersion et l’identification en prenant un risque d’insatisfaction.

- le cadre narrativiste délégant la capacité de faire évoluer l’environnement à tous et répartissant un contrôle des antagonistes garantit que chaque joueur ait la possibilité de recadrer l’histoire vers ses attentes. Ici, on ne découvre plus un scénario mais on s’assure qu’il couvrira des thématiques qui nous intéressent. Ce pouvoir accru sur l’environnement extérieur aux personnages introduit une distanciation plus importante. Le joueur fait agir ses personnages mais détermine aussi les ennuis auxquels ils sont confrontés. Par ailleurs, les systèmes de jeu s’attachant à préserver la fluidité de l’échange et la mise en place d’une histoire cohérente en fin de session, ils peuvent modifier la capacité d’action des personnages les mettant dans une posture plus réactive. On n’a néanmoins pas la garantie d’obtenir au final un scénario cohérent notamment si l’on ne s’est pas mis d’accord à l’avance sur les attentes de chacun de sorte à ne pas introduire de la magie là où un joueur s’attendait à un cadre Hard Science ou des mascottes délirantes au milieu d’une scène véhiculant une forte tension dramatique.
En gros, en ludisme, le Meuj pose le cadre et les joueurs le modifient par l’intermédiaire des personnages, en narrativisme, les joueurs influencent tous le cadre sans passer par les personnages et ces derniers réagissent de manière automatique, sujets d’observation plus qu’avatars du joueur.

Donc pour résumer, si vous voulez enquêter et vivre de l’intérieur une histoire construite et planifiée quitte prendre le risque que la difficulté soit mal dosée ou que les enjeux du scénario ne vous emballent pas tant que ça, c’est plutôt ludisme.
Si vous voulez faire émerger une histoire en s’appuyant sur un cadre flou autour de thématiques qui vous intéressent (dont les développements peuvent s’avérer surprenants au demeurant) au détriment d’une partie de l’immersion individuelle et sans chercher à résoudre les problèmes soulevés, le système de jeu servant généralement à saupoudrer d’un peu d’aléatoire pour imposer le dénouement, c’est plutôt narrativisme.
En fait un jeu narrativiste, c’est un peu comme si plusieurs Meuj’ se réunissaient pour construire ensemble un scénar en suivant un cadre de règles. Si le scénar est bon, il serait presque possible d’en créer des prétirés et de changer de système pour le faire découvrir à d’autres suivant une approche ludiste…

Allez, la prochaine fois si ça vous intéresse, on causera système de règles et métajeu.

Sinon, pour préparer les badass crossover battles, voici un pirate zombie tout a fait original… Ah au temps pour moi, c’est une repompe de mémoire de Lechuck… Je vais revoir un poil sa jambe tordue… Elle doit l’être mais là, elle est juste moche…

zombirate

zombirate

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Du sexisme en ces lieux

by Sbeu on avr.18, 2013, under Text Only

Une fois n’est pas coutume, un petit article de fond sur un sujet d’actualité geek.
Il y a une polémique en ce moment sur le sexisme dans les jeux vidéos et plus généralement dans la communauté geek.
La pierre d’achoppement du moment dans la communauté francophone est à ce que j’ai compris ce long article.
Qu’on adhère au propos ou pas n’est pas spécifiquement le sujet de cet article. Ici, je vise plutôt à réfléchir sur un cas concret à savoir ces lieux, sur la vocation de ce blog et sur l’image qu’il peut diffuser (étant donné sa fréquentation, c’est pas grand chose mais l’exercice est intéressant) ainsi que l’image qu’il donne en filigrane de son auteur, ce qui m’intéresse quand même un peu étant donné que je l’aime bien…

Avant propos :

L’un des ciments majeurs de la communauté geek sur internet est l’ironie et le côté libre, détendu et « entre potes » de l’utilisation d’internet. En gros, ceux qui appartiennent à la communauté se considèrent mutuellement comme rationnels, intelligents et sont sensés faire la part des choses. par conséquent, c’est d’autant plus drôle de raconter des énormités qu’on ne pense pas, on est entre beaux esprits, que diable, c’est toi qu’as rien compris, tralala.
C’est un argument qui a l’air d’avoir pas mal été opposé à la rédactrice de l’article précédemment cité et qui me paraît assez fallacieux.
Moi-même grand amateur et utilisateur de propos ironiques, d’humour noir et trash, j’ai un souci avec certains blogs d’opinion qui se sont construits autour d’une réputation de féroce ironie. Il arrive assez fréquemment, une fois cet état de faits établi, que tout contradicteur soulignant certains points discutables sur un nouvel article se voie rapidement envoyé sur les roses sous prétexte qu’il ne comprend rien au second degré, généralement par un membre de la communauté et non par le tenancier lui-même qui peut continuer (et a tout intérêt à le faire) d’entretenir sa réputation par un confortable mutisme.
Or le second degré n’est pas, contrairement à ce que laisse penser son nom, une notion binaire. Le taux de sincérité dans le propos et le contenu évolue de manière assez continue et il est possible de dire le contraire de ce qu’on pense comme de volontairement forcer le trait de ses opinions et faire rentrer les deux sous la même étiquette de sarcasme. La notion de second degré s’appuie donc sur une connivence mutuelle entre l’auteur et le lecteur. S’il n’y a rien de pire qu’expliquer une blague, désambigüer certaines incompréhensions assez régulièreemnt me parait assez sain afin de renforcer cette relation. De la sorte, les lecteurs réguliers disposent du recul suffisant et d’une échelle de repères pour pouvoir évaluer le degré de sincérité et l’implication personnelle de l’auteur et de fait, savoir comment interpréter ses propos sans passer à côté du message. C’est bien sympathique de constater que les gens sont cons, mais leur donner des pistes d’amélioration, c’est pas mal non plus.

Pour résumer, lorsqu’on est tout le temps sarcastique, l’ironie constitue un bouclier bien pratique pour conserver sa respectabilité dans les cas où l’on dit sincèrement de la merde, et c’est encore mieux quand c’est un sous-fifre qui le brandit à notre place.

Si je clarifie ce point en amont, c’est juste pour qu’on ne me dise pas : on sait qu’il t’arrive de manier l’ironie donc par conséquent le message véhiculé par le contenu que tu héberges n’a pas d’importance puisque rien ne doit être pris littéralement. Et par conséquent, ça vaut le coup de se demander si ce qu’on publie est moralement défendable.

Visées du sbeulog

Le sbeulog est une plateforme d’expérimentations graphiques et narratives qui a pour but premier de me motiver à travailler ces deux points et de m’exposer à la critique pour progresser. Sans ça, j’ai facilement tendance à m’encrouter et à finir par glander sur steam…
Il ne faut pas déconner non plus, il y a un côté narcissique certain de recherche d’approbation car si c’est la critique qui fait avancer, j’aime bien les compliments aussi.
Le format blog avec conservation d’archives permet de voir l’évolution positive ou négative et de se remettre en question de temps en temps.
J’y teste donc des trucs en matière de dessin et les compte rendus de partie me permettent de voir ce qui marche ou foire au niveau scénar afin de comprendre les dynamiques en oeuvre.

Et en pratique, le contenu

C’est là qu’on aborde les choses sérieuses et que l’on entre véritablement dans le sujet.

Les chiffres bruts
Fonctionnant à la motivation, le sbeulog présente les travaux qui m’ont suffisamment inspirés pour être un minimum présentables. Pour des raisons de préférences esthétiques personnelles, c’est souvent les personnages féminins qui passent le crible du « ce dessin commence à me gonfler, j’en ai marre, je lâche l’affaire ». Le ratio est effectivement déséquilibré de ce point de vue et le sbeulog est globalement genré.

L’image véhiculée (images ponctuelles)
N’étant pas assez entraîné/talentueux/[insérer adjectif idoine ici]. J’en suis encore à devoir faire de l’anat. L’anatomie, c’est bien connu, ça marche mieux sur du nu et avec des positions contraignantes. Suite au point précédent mécaniquement, ce blog comporte pas mal de nudité féminine. Les modèles présents sur internet véhiculent eux-même une image sexiste, par transitivité, le sbeulog aussi. J’ai encore pas mal de progrès à faire en dessin donc il reste du boulot de manière à dessiner des êtres humains corrects avant de se demander s’il faut que je travaille plus précisément un sexe ou l’autre.

La place des personnages (personnages construits)
Toujours pour des raisons esthétiques et pour l’intérêt dans un scénario de leurs relations avec les autres personnages, j’ai une préférence nette pour les personnages féminins. Cela se traduit notamment sur mes persos en JdR où le ratio de genre des illustrations du sbeulog est assez représentatif. Attention hein, on ne parle pas de la potiche ou du faire valoir, on parle de personnages qui roxxent vraiment et qui surpassent généralement leurs homologues masculins. Là, il suffit de prendre les images mettant en scène une empoignade entre une fille et un mec, je ne pense pas souvent avoir d’occurrence où la donzelle ait le dessous. Ici, je fais limite du sexisme dans l’autre sens.
Il arrive que ces personnages soient hypersexués mais ce n’est pas forcé. Généralement, leur caractéristique principale reste d’être badass.
Ces personnages véhiculent presque sûrement de nombreux clichés de genre. Je ne pense pas qu’ils soient dégradants notamment parce que ces persos exercent un fort capital sympathie sur moi. Ils peuvent être francs, fourbes, intelligents paumés, puissants, faibles, la base, c’est que je les aime bien.
Au niveau de leur histoire passée, ce qu’ils ont subi… Je suis des règles assez rigides lors de la création d’un personnage. Si je n’ai pas envie de me casser la tête, pour rendre un perso intéressant, il a droit à : un but personnel, une raison profonde dans son passé pour poursuivre ce but (c’est plus facile quand c’est fondé sur un drame), une attitude de façade qui fait qu’il a l’air à sa place dans son environnement, une caractéristique particulière qui fait qu’il a l’air en dehors de son élément au quotidien. Pas d’histoire de genre là dedans, tout le monde est logé à la même enseigne, tout le monde a son drame fondateur.

la terminologie.
Les tags girls and/without guns sont assez symptomatiques du niveau de clichés dans la place. De même, un certain nombre de textes accompagnant les images ne sont pas d’une finesse exemplaire. Preuve s’il en faut, les mots clefs tapés dans les moteurs de recherche qui finissent par faire aboutir ici. C’est pas nécessairement brillant et c’est en grande partie ma faute.

Du coup, la conclusion et l’avenir

- Le sbeulog a-t-il un objectif sexiste ? En aucune manière
- Véhicule-t-il des images sexistes ou pouvant être perçues comme dégradantes ? Très certainement, oui.
- Est-ce grave ? Je ne pense pas mais je suis ouvert aux remarques.
- Est-ce que vous souhaitez que ça change ? Là, pareil, c’est open suggestions. De toutes manières, faut que je dessine des gugusses aussi.

J’aime bien le débat et suis intéressé par le ressenti des gens que je connais qui passent ici mais je suis aussi et surtout curieux de la position des Anons s’il y en a.

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